Le 9 décembre 2022, l’avionneur chinois COMAC (Commercial Aircraft Corporation of China) a livré le tout premier exemplaire de son C919, annoncé au public en 2009, avec six ans de retard, à la compagnie China Eastern Airlines sous l’immatriculation B-919A. Se positionnant dans la catégorie des avions moyen-courrier, COMAC espère ainsi à terme se présenter comme le troisième acteur majeur dans l’aviation commerciale en concurrençant le duo bien implanté : Airbus/Boeing. Dans cet objectif, le C919 se positionne dans la même catégorie que les best-sellers Airbus A320 et le Boeing 737. Mais a-t-il aujourd’hui de quoi permettre à la Chine de faire un brin d’ombre aux deux géants ?
I- Un début aux performances timides
Dès 2009, COMAC a fait le choix de propulser son avion grâce au moteur Leap développé par CFM, qui est une coentreprise entre Safran et General Electric, pour réduire la consommation de 15% par rapport au CFM56 qui propulse les A320ceo et 737NG. Par la suite, ce moteur Leap est devenu le centre de l’actualisation faite par Airbus et Boeing sur leurs vieillissants A320ceo et 737NG avec la sortie des versions, respectivement, « neo » et « MAX » et c’est pourquoi nous allons comparer le C919 à ces versions.
A partir de ce tableau, on remarque bien que le C919 est bien inférieur en termes de rayon d’action par rapport à ses rivales avec une capacité de passagers bien en dessous (au moins 42 passagers en moins). Cela s’explique notamment par le fait que les composants utilisés ne sont pas aussi avancés et le fait que le 737MAX-8 et l’A320neo ont une capacité d’emport de kérosène bien plus importante (6 000 litres de plus pour l’A320neo).
Le seul point positif est l’écart de prix à l’achat qui est d’au moins 12 millions d’euros.
II- Un avion chinois bien occidentalisé
Malheureusement pour la Chine, les composants utilisés pour construire ce C919 sont majoritairement occidentaux. Cela rend le modèle bien vulnérable à d’éventuelles sanctions internationales.
Comac C919.jpeg © DR
Grâce à cette illustration, on constate que des éléments clefs comme le radar météo, le système de contrôle de vol, le groupe auxiliaire (APU) et même les moteurs sont occidentaux.
La Chine a cependant officialisé sa volonté d’indépendance via la création de l’Aero Engine Corporation of China (AECC) en 2016 qui vise à construire le premier moteur chinois. Cela permettrait à la Chine de pouvoir afficher un avion chinois propulsé grâce à des moteurs chinois. Mais étant donné que le moteur est reconnu comme la pièce la plus compliquée d’un avion, nous en sommes encore loin.
II- Un acteur majeur en devenir ?
Avec le C919, COMAC n’en ait pas à son premier avion. En effet, depuis 2016, COMAC produit le ARJ21 qui est un avion régional pouvant transporter jusqu’à 95 passagers. Il en a d’ailleurs livré le 100e exemplaire le 29 décembre 2022.
Comac ARJ121 au décollage
Cependant, COMAC reste toujours très en retard en matière de certification. Le C919 est à l’heure actuelle certifié uniquement par l’agence chinoise et donc ne peut voler qu’au-dessus de la Chine. L’AESA (Agence Européenne de la Sécurité Aérienne) et la FAA (Federal Aviation Administration) pour les Etats-Unis ne l’ayant pas certifié pour l’instant, le marché international reste très fermé pour le C919.
Malgré cela, l’industriel annonce avoir plus de 1000 commandes (fermes et options confondues) de la part de plus de 28 compagnies aériennes chinoises et une seule occidentale de la compagnie de leasing GE Capital avec 10 avions fermes et 10 autres en options. Cela reste bien en dessous des 8 500 annoncées par Airbus pour son A320neo et des 3 520 pour le 737MAX.
Finalement, avec l’arrivée du C919, COMAC ne devient pas un concurrent majeur dans le secteur mais ses ambitions sont très affirmées. L’industriel est d’ailleurs en partenariat avec la russe United Aircraft Corporation (UAC) dans l’entreprise CRAIC (China-Russia Commercial Aircraft International Corporation) pour construire un avion long-courrier, le CR929. Ce projet est devenu incertain à la suite des sanctions occidentales contre la Russie et les désaccords internes chez CRAIC mais rien n’exclut que la Chine puisse le continuer seule.
Hadrien LEHMANN HERFORT
Sources :
Simple Flying: https://simpleflying.com/
Usine nouvelle : https://www.usinenouvelle.com
Air&Cosmos : https://air-cosmos.com
Air Journal : https://www.air-journal.fr
Radio Classique : https://www.radioclassique.fr
Boeing : https://www.boeing.com
Les Echos : https://www.lesechos.fr
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