L’industrie aéronautique innove de jour en jour, et depuis quelques années, nous portons une grande importance au sujet de son développement durable. Tout d’abord, au vu des enjeux climatiques qui nous concernent. En effet, le réchauffement climatique s’accélère, et des mesures sont à prendre pour réduire les émissions de gaz à effet de serre. Mais c’est aussi l’aspect économique qui importe à la fois à l’entreprise mais aussi et surtout aux compagnies aériennes qui achètent les avions. Effectivement, au vu de la hausse du prix du baril constatée cette dernière décennie, l’enjeu de consommer moins est un élément clé dans la fabrication des nouveaux appareils.
Mais le pari du développement de technologies durables est-il réellement rentable pour une entreprise. Des avionneurs comme Airbus ou Boeing peuvent-ils s’y retrouver alors que les ventes de ses avions stars sont grandissantes ? Sont-ils prêts à sortir de leur zone de confort au profit du développement durable ?
Cela fait quelques années que l’on voit émerger de nombreuses alternatives aux carburants actuellement utilisés. Il existe des solutions, mais ces dernières sont, pour une grande majorité, développées par de petites entreprises qui cherchent à les perfectionner et à les adapter de façon à ce que ces dernières soient notamment utilisables dans des avions de plus grande capacité. Dans la liste on trouve notamment, le DLR (centre allemand pour l’aéronautique et l’astronautique), avec son prototype d’avion fonctionnant à l’hydrogène /"HY4" et la fondation Solar Impulse avec le Solar Impulse 2 qui sait compter sur ses panneaux solaires pour pouvoir se déplacer à l’aide de moteurs électriques.
Mais un autre avionneur attire aussi notre attention… Il s’agit d’une entreprise déjà bien installée dans l’industrie aéronautique et qui cherche aussi les solutions durables de demain. Airbus et sa filiale "VoltAir" a développé l’"E-Fan", un prototype d’avion qui fonctionne à l’électricité grâce à des batteries qui lui permettent de voler environ une heure suivant les conditions de vol. Le prototype aura permis, près d’un siècle après l’exploit de Louis Blériot en 1909, de traverser lui aussi la Manche mais cette fois-ci en vol totalement électrique.
L’exemple n’a pas été choisi au hasard. Car même si l’exploit donne une vision positive à propos de l’entreprise, la réalité est en fait toute autre. Débuté en 2012, le projet a été mis de côté par l’entreprise depuis 2017. L’idée de construire une usine pour produire l’E-Fan 2.0 a été totalement abandonnée, et l’idée d’introduire sur le marché un avion entièrement électrique l’a également été. Airbus s’est tourné vers une toute autre voie, celle d’un avion hybride, c’est-à-dire, fonctionnant à la fois à l’aide de kérosène et d’électricité stockée dans des batteries. Son nom… "E-Fan X". Un nom qui n’enterre pas l’ancien projet mais qui marque le nouveau tournant que veut entamer l’avionneur.
Du côté de Boeing, la voie suivie s’est elle aussi accordée avec un prototype d’avion hybride commercial et ce, bien avant les recherches d’Airbus puisque cela fait depuis 2006 que l’avionneur a présenté son concept d’avion "Sugar Volt". Il serait propulsé par un moteur hybride. Au décollage, à pleine puissance le moteur utiliserait du carburant, et l'électricité prendrait le relai en altitude pour réduire de 70 % environ la consommation de kérosène. Le conditionnel montre bien que Boeing nous donne ici sa vision de l’avion de demain, mais à l’heure d’aujourd’hui, aucun prototype n’a permis de traduire cette vision encore idéaliste. On voit tout de même que Boeing voit un avenir assez concret à son prototype puisque le projet repose sur la volonté de produire, dans un futur proche, des avions commerciaux hybrides. Mais l’avionneur communique peu sur ce projet d’aéronef, et il va de soi qu’il faudra du temps avant de voir arriver une version finale de son concept…
Nous comprenons par ces exemples que de grands acteurs ont mis des moyens dans l’avancée des nouvelles technologies durables des avions de demain. Airbus et ses filiales ont tout de même dépensé près de 50 millions d’euros pour un projet qui était malgré tout mené à son échec quelques années plus tard. Mais les avionneurs restent tout de même très réfractaires face à ces nouveautés alors que leurs chiffres d’affaires sont grandissants. En effet, l’objectif des industriels de l’aviation restent tout de même, et en premier plan, leur rentabilité. Utiliser le pétrole, dont les systèmes et moteurs sont connus et simulables, permet de générer du revenu sans investissement supplémentaire, ce qui revient à une meilleure rentabilité à court terme. Les entreprises n’arrivent pas à se projeter dans le long terme et cela freine complètement leur volonté d’innover et de changer les choses.
Plus globalement, nous pouvons dire que c’est l’humanité qui est remise en cause. Les entreprises sont focalisées sur la rentabilité à tout prix alors que l’humanité touche potentiellement à sa fin. Les ressources fossiles de notre planète arrivent à sec… mais qu’importe, elles ne le sont pas encore… alors pourquoi changer… ? C’est par ces mots que l’on comprend la tristesse du phénomène. Les ressources terrestres s’épuisent, l’être humain est soumis à des hausses de températures significatives depuis des années, mais rien ne change, ou du moins pas à l’échelle industrielle. Certes, comme nous l’avons vu, l’hybridation est sans nul doute un défi intéressant à relever pour les prochaines décennies, mais le temps passe et notre planète ne peut attendre. Les émissions massives de gaz carbonique dans l’atmosphère accentuent l’effet de serre et la combustion de ces énergies fossiles libère aussi des polluants très nocifs à la fois pour notre environnement mais aussi pour l’être humain lui-même. Selon l’industrie aéronautique, près de 3% des rejets mondiaux de CO2 sont émis par les avions de ligne.
Il serait donc temps de voir la réalité en face et de prendre les devants sur ce sujet essentiel. Le fait que deux avionneurs importants soient actifs au sujet de l’avion durable est un premier pas. Affaire à suivre…
Bibliographie et articles relatifs au sujet qui peuvent vous intéresser :
-IPSA. AÉRONAUTIQUE ET DÉVELOPPEMENT DURABLE. 16 Décembre 2010. <https://www.ipsa.fr/blogs/2010/12/aeronautique-et-developpement-durable/Aeromorning>
-Le développement durable au cœur de l’entreprise aéronautique. 11 Juillet 2017. <http://www.aeromorning.com/blog/developpement-durable-coeur-de-lentreprise-aeronautique/Corot> Léna.
-Airbus, Boeing, Zunum, Wright Electric... Ils volent tous pour l'avion électrique. 23 Janvier 2018.
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